Sylvain Lecombre, entretien, 1998
Jeux de genres
Extraits d ’un entretien avec Sylvain Lecombre, rue d ’Arcueil, 22 janvier 1998
Dans les dispositifs visuels que j ’élabore, le paysage entre pour une large part. Mais il est associé à l ’architecture qui reste pour moi une préoccupation essentielle, car sans le mur, pas de peinture. Le tableau est une fenêtre, une ouverture et tout se joue dans le passage : passage entre l ’architecture et la nature, entre l ’artificiel et le naturel. Le monde est un cabinet de curiosités, de l ’aile de papillon à un échangeur d ’autoroute, de la topiaire d ’un jardin de banlieue à des monuments contemporains comme les centrales nucléaires. Il est sûr que je ne suis pas un peintre de paysage au sens strict du terme mais je me sers d ’extraits de paysage, d ’éléments qui y sont permanents et pourtant toujours différents : les ronds dans l ’eau, les nuages, les ombres…
Représenter le réel par les outils traditionnels de la peinture me semblent difficile aujourd ’hui où l ’on ne peut être que dans la présentation. L ’emploi de la photographie me permet de pallier cette difficulté. Il me semble faire œuvre de peintre lorsque je retravaille, recadre et extrais quelque chose de mes photographies numérisées.
C ’est à la villa Médicis que j ’ai produit la série des “Agrégats”. Un travail réalisé dans l ’obscurité à partir de projections photographiques numérisées de nuages. Il y avait quelque chose de dérisoire à reproduire très lentement à la main ce qu ’avait exécuté rapidement et mécaniquement une imprimante. Mais cette implication physique très éprouvante, les heures passées à dessiner dans le rayon lumineux du projecteur ont été une étape importante, une situation paradoxale : faire surgir la lumière dans la nuit de l ’atelier.